Le masque réduit les infections COVID de 0,06%
Voici une des dernières études, qui n’est pas une modélisation mathématique, voulant montrer une efficacité du masque.
Impact of community masking on COVID-19: A cluster-randomized trial in Bangladesh [1]
Une étude sur plus de 340 000 personnes suivies.
Mais…
Que dit l’article ?
Le masque est « effectif pour réduire les infections symptomatiques au COVID. »
Que disent les médias ?
« C’est la preuve que le masque est efficace contre les maladies respiratoires. »
Alors qu’avant la période COVID, jamais personne n’avait osé en faire porter à des enfants en bonne santé pendant des mois, 8h par jour… pour lutter contre les maladies respiratoires qui faisaient 4,5 millions de morts par an sur la planète.
Les résultats
Avant de rentrer dans le détail, voici le graphique, fait à partir des chiffres présentés dans la publication, pour montrer la différence apportée par les masques chirurgicaux.
La probabilité de ne pas avoir le COVID est donnée en %.
Figure 1 : Probabilité de ne pas avoir le COVID selon les chiffres de l’étude
La différence :
-0,06 %
Le port du masque, sur la période étudiée (plusieurs mois), a permis aux auteurs de calculer une réduction du risque absolu de seulement 0,06%.
6 centièmes de %
Difficile de faire plus petit.
Précisions sur les chiffres
Pour être précis, selon les données présentées dans l’article et les data complémentaires des auteurs [2], il est possible de préciser les données suivantes :
- 0,06% : pour l’ensemble des masques (chirurgicaux et tissus), il y a eu d’un côté, 1106 cas pour 161211 personnes sans masque soit 0,68% et, de l’autre côté, 1086 cas pour 174171 avec masque soit 0,62%. On est en présence d’une différence de 20 cas d’infection vérifiées sur plus de 335382 personnes suivies, soit 0,06% de réduction.
- 0,08% : pour les masques chirurgicaux, il y a eu, d’un côté, 774 cas pour 103247 sans masque soit 0,75% et, de l’autre côté, 756 cas pour 113082 personnes avec masque soit 0,67%. On parle de18 cas d’infections vérifiées de différence sur 216329 personnes, c’est 0,08% de réduction.
- 0,04% : Uniquement pour les masques en tissu, il y a eu, d’un côté, 332 cas pour 53691 sans masque soit 0,62% et, de l’autre côté 330 cas pour 57415 personnes avec masque soit 0,58%. On parle de 2 cas d’infections vérifiées de différence sur 111106 personnes, c’est 0,04% de réduction.
Pour être sûr que l’effet mesuré n’est pas un artefact de la mesure, il faudrait discuter, si toutefois cela est nécessaire vu qu’il s’agit de centièmes de % d’écart, de la significativité de ces réductions.
La réponse de la significativité est apportée par la comparaison des groupes « témoin (sans masque) » des 2 expériences (masques tissus et masques chirurgicaux).
On constate des écarts, alors qu’intuitivement ce sont 2 populations qui devraient montrer la même prévalence pour l’infection, puisqu’identiques (aucune intervention, pas de masque). Or la prévalence du groupe contrôle pour les masques chirurgicaux est de 0,75% et celle du groupe contrôle pour les masques en tissu est de 0,62%.
Les 2 groupes choisis, qui ne portent pas de masque, ont un écart mesuré de 0,13%.
Cet écart est bien plus grand qu’entre les groupes qui portent le masque et ceux qui n’en portent pas (0,08% et 0,04%).
On peut alors dire qu’un écart global de 0,06% n’est vraiment pas significatif.
Les problèmes de méthodologie
Les principaux problèmes de l’étude sont des extrapolations totalement imaginaires.
- Les auteurs ne sont pas en mesure de dire combien de personnes ont réellement porté le masque dans les villages du groupe « masque » (qui ont reçu des masques et l’incitation de les porter). Alors ils partent du principe que c’est le cas de tous, des plus de 170 000 habitants de la zone choisie.
C’est le même problème pour les autres villages du groupe « contrôle (sans masque) ».
Sauf qu’il est évident que sans connaitre le nombre de personnes qui ont réellement porté le masque, les tentatives de calcul d’une efficacité des masques sont impossibles. Scientifiquement ridicule ?
- Pour le groupe « masque », sur les 13 273 personnes qui se sont autodiagnostiquées un COVID, seulement 5 006 ont accepté un prélèvement sanguin. Cela représente seulement 38% des cas COVID déclarés. Au final il y a seulement 1 086 cas réels soit à peine 22% des gens testés pensant avoir le COVID qui l’ont réellement eu. (Respectivement 13893, 4971, 36%, 1106, 22% pour le groupe « contrôle (sans masque) »).
- Le nombre de cas symptomatiques confirmés par test biologique (1086 et 1106) n’est pas donné dans l’article. Cette information pourtant essentielle n’a pas été donnée par les auteurs. Il faut la calculer à partir des chiffres donnés. C’est quand même très bizarre ou anormal dans une publication scientifique.
- Autre problème important, il est quasi impossible de refaire les calculs. Pour la population totale, les chiffres donnés permettent de calculer assez sûrement. Mais il est impossible de refaire une bonne partie des calculs car les informations sont incomplètes.
Le cas de personnages âgées
Selon les auteurs, les masques fonctionnent mieux chez les personnes âgées : réduction 3 fois plus importante que pour la population totale.
Les auteurs découvrent donc un fait remarquable puisque jamais ce type de conclusion n’a été rapporté auparavant. Jamais dans aucun article portant sur la mesure de l’efficacité des masques.
C’est donc une nouveauté que nous aimerions comprendre.
Il est difficile de confirmer ces chiffres car il est impossible d’en refaire les calculs. Le nombre de cas dans chaque classe d’âge n’est pas donné.
Le plus étonnant c’est que les auteurs précisent qu’ils n’ont pas mesuré directement l’âge pendant la surveillance.
Il est donc impossible de savoir comment ils arrivent à leur conclusion sur cette réduction plus importante pour les plus âgées.
Autres présentations graphiques
Figure 2 : Probabilité de ne pas avoir le COVID selon les chiffres de l’étude.
Comme les médias, on peut modifier l’échelle sur les ordonnées pour partir de 99,3 vers 99,39 au lieu de 0 vers 100 comme au début de cet article.
L’effet « loupe »…
L’impression est forte… mais il n’empêche que la différence reste la même !
-0,06 %
On peut aussi montrer le risque d’infection comme dans l’article (à gauche) avec un bel effet loupe.
Ou en totalité (à droite), sans l’effet grossissant sur l’efficacité mesurée.
Figure 3 et 4 : Probabilité d’avoir le COVID selon les chiffres de l’étude avec 2 échelles différentes.
Conclusion
Sans même discuter la validité des résultats, qui semble bien faible au vu des problèmes décrits précédemment, on peut s’interroger sur la signification de la valeur de 0,06%, de son importance, de son impact.
Chacun met le seuil où il veut !
50%, 25%, 10%, 1% ?
Mais il faut se demander si 0,06% de réduction sont suffisants pour faire porter un masque à des enfants de 6 ans, 8h par jour ou à 60 millions de gens bien portants.
Pour avoir l’ensemble en détail : [3] [4]
Références
[1] https://www.science.org/doi/10.1126/science.abi9069 ou
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34855513/
[2] https://gitlab.com/emily-crawford/bd-mask-rct
[3] https://www.researchgate.net/publication/360320982_The_Bangladesh_Mask_study_a_Bayesian_perspective